Y'avait à Sidihowa bien avant
la guerre
Un Bédoin qu'était l'papa
d'une jolie moukère
Mais une caravane campa qui venait
du Caire
Sans manière, par derrière,
la p'tite décampa
La fille du Bédouin suivait nuit
et jour cette caravane
Elle mourait d'amour pour un jeune
bédouin de la caravane
Et le petit ânier, dans les bananiers,
chipait des bananes
Que la fille du Bédouin rangeait
avec soin dans son petit couffin
Mais voilà qu'elle endura quand
elle fut en route
Elle dut en sortant de Biskra pour
gagner sa croûte
Céder son petit, ses draps,
et sa petite moumoute
Coûte que coûte,
y'a pas d'doute, à ces scélérats
La fille du Bédouin suivait nuit
et jour cette caravane
Elle connut tour à tour tous
les autres Bédouins de la caravane
Et tous les chameliers et tous les
âniers en firent leur Sultane
La fille du Bédouin avait trouvé
l'joint pour garnir son couffin
Elle a suivi soixante ans et par toute
l'Afrique
Du Maroc jusqu'au Soudan comme une
pauvre bourrique
Et elle usa toutes ses dents à
bouffer des briques
Sans réplique, à coups
de triques, on la pousse tout le temps
La fille du Bédouin suivait nuit
et jour cette caravane
Elle connut tour à tour les
trois mille bédouins de la caravane
Douze cent chameliers, dix-huit cent
âniers portèrent des bananes
Et sans trouver la fin, la fin du couffin,
de la fille du Bédouin